Bayonne et Biarritz sont à moins d’une heure de route, mais la mer semble déjà loin. Les montagnes sont rondes, les pâturages verts, la végétation exubérante. De la terrasse de l’Auberge Ostape, le regard se noie devant le sublime spectacle naturel, la quiétude s’installe et il ne faut pas attendre longtemps pour plonger non pas dans la piscine en contrebas mais dans les assiettes exceptionnelles de John Argaud.
De son riche parcours professionnel, retenons son expérience ducassienne au Meurice (Paris) et celle auprès de Christophe Bacquié du coté du Castellet. « Ce sont celles qui comptent le plus pour moi » explique-t-il. Rigueur, respect du produit, mais aussi une certaine liberté qu’il revendique sans mal, expliquant qu’il change régulièrement ses plats, jonglant entre les contraintes du territoire, la distance qui oblige à faire preuve d’une grande dextérité côté logistique et les aléas climatiques qui forcent à changer son fusil d’épaule régulièrement. Sur la carte, on parle ainsi du « poisson du jour » en fonction de ce que la mer a bien voulu offrir le jour J. La cuisine s’adapte, le service aussi. Le plaisir, lui, ne baisse jamais pavillon.
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Du plaisir, il y en a eu à chaque étape, chaque plat, chaque bouchée même. Pas une seule fois le palais s’ennuie tant la cuisine réalisée ici confine parfois au sublime. Au fil du repas, nous avons limité l’usage des superlatifs, se demandant si nous n’étions pas envouté par le spectacle du paysage, la gentillesse toute professionnelle du service, ou l’accord mets et « elixirs » sans alcool proposé. Même pas. La fascination ambiante venait belle et bien des multiples assiettes du menu « Signature » dans lequel on déguste actuellement un « maigre de ligne de Saint-Jean à peine saisi, tagète mandarine, mucilage de carotte, caviar osciètre d’aquitaine » divin, ou une « fleur de courgette farcie, cuite sur la pierre du Baztan, seiche grillée, basilic, écume florale » d’une rondeur, d’une fraicheur et d’une vivacité ébouriffantes. Tout le reste du repas jouera le même registre, entre esprit terre-mer parfaitement maitrisé, barbecue et fumage maîtrisés, jusqu’aux desserts touchants du pâtissier Damien Albert.
Récompensée d’une étoile en 2024, la table de l’Auberge Ostape peut sans le moindre doute viser bien plus haut tant la maitrise technique semble évidente, sans jamais s’opposer au plaisir simple de se faire plaisir avec des plats aussi fins que gourmands. Du grand art, une très belle émotion. Envouté ? Ensorcellé plutôt par la cuisine d’un très grand chef.
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Pratique | Site de l’Auberge Ostape | John Argaud sur Instagram
Photographie | Emmanuelle Levesque