Michelin : de nouvelles étoiles en Belgique et au Luxembourg, une rétrogradation et zéro femme

Lundi 28 avril s’est tenue à Anvers (Belgique), se tenait la cérémonie du guide Michelin Belgique et Luxembourg. Deux nouveaux restaurants accèdent au cercle prestigieux des deux étoiles : Léa Linster à Frisange (Luxembourg) et Maison Colette, à Tongerlo, en Flandre (Belgique). Treize autres restaurants décrochent leur première étoile.

Avant les étoiles et la fête, un hommage. Dans la somptueuse salle gothique de la Handelsbeurs, les applaudissements ont d’abord retenti pour saluer Jonnie Boers, le seul chef trois étoiles des Pays-Bas, décédé le 23 avril dernier suite à une embolie pulmonaire. Avec sa femme, il était le propriétaire du restaurant De Librije, à Zwolle (Pays-Bas). 

Après la tristesse et l’émotion, place à la cérémonie. Une vidéo de Gwendal Poullennec, directeur international du guide Michelin, ouvrait la présentation des lauréats. Il ne se mouillait pas beaucoup en déclarant que « nous assistons à l’émergence d’une nouvelle génération de talents, à l’affirmation culinaire de maisons installées, ainsi qu’au lancement de nouveaux projets portés par des chefs déjà bien établis. Qu’ils s’appuient sur la tradition ou qu’ils soient portés par l’innovation, les établissements distingués surprennent, ravissent et inspirent ».

Dans une alternance politiquement correcte entre la Flandre, Bruxelles, la Wallonie et le Luxembourg, les nouveaux étoilés sont annoncés, à commencer par Quentin Gallopyn, du restaurant La Vicomté, à Roucourt, qui venait de recevoir le prix du Jeune chef. Parmi les nouvelles étoiles, nombreuses sont celles à être attribuées à des restaurants à la tête desquels on trouve des chefs déjà renommés : Kobe Desramaults (Eliane à Bruxelles), Giuseppe Giacomazza (La Botte à Genk), Wouter Van Tichelen (Mémoire à Bruges) ou Dimitri Proost (HAUT à Ostende). Au Luxembourg, René Mathieu retrouve dans son nouvel établissement Fields l’étoile acquise en 2012 à La Distillerie. Il livre toujours une cuisine végétale recherchée qui lui vaut aussi une étoile verte.

Les trois chefs étoilés du Luxembourg : Louis Linster, Clovis Degrave et Archibald De Prince

La jeune génération est aussi à l’honneur à l’image de François-Xavier Simon (Bistrot Blaise à Marche-en-Famenne), Curtis Maquet (Beau Rivage by Curtis à Dave) ou Maxime Zimmer (Un Max de Goût à Comblain-au-Pont). Le Luxembourg tire bien son épingle du jeu avec deux jeunes chefs salués d’une étoile : Clovis Degrave qui, à la Grünewald Chef’s Table propose une expérience forte et marquée en goûts qui se vit au comptoir. « Quelle émotion ! C’est une belle récompense pour toute l’équipe qui va nous permettre d’aller plus loin dans notre travail », commentait Clovis Degrave. Archibald De Prince, second de René Mathieu pendant huit ans et candidat belge au Bocuse d’Or, qui signe une cuisine créative qui fait la part belle aux produits, décroche aussi sa première étoile, à peine six mois après l’ouverture du restaurant qui porte son nom. « On a tout mis en œuvre pour atteindre tout de suite l’excellence, mais on ne pouvait pas être sûr que ça allait payer », nous explique-t-il. Pas sûre non plus Njomza Musli, l’épouse de Louis Linster et directrice de salle du restaurant Lea Linster nous confiait : « Quand la présentatrice a annoncé qu’il n’y avait que deux nouveaux ‘deux étoiles’, j’ai pensé que c’était foutu ». L’explosion de joie fut d’autant plus grande quand Frisange, le nom du village où le restaurant est installé, est apparu à l’écran. Chef depuis 2019, Louis Linster (35 ans) a succédé à sa mère, la légendaire Lea Linster, seule femme lauréate du Bocuse d’Or. Il développe aujourd’hui une cuisine contemporaine, épurée, marquée par des saveurs franches et une influence asiatique, avec un accent particulier sur le travail des sauces. « Le plus beau cadeau dont je pouvais rêver pour mes 70 ans », a commenté Lea, venue sur scène féliciter son fils. Thijs Vervloet, qui avait deux étoiles pour son restaurant Colette, les conserve dans son nouvel établissement, Maison Colette situé à Tongerlo.

Malgré la présence sur scène de nombreuses épouses de chefs, essentielles dans leurs établissements, aucune femme ne figure cette année parmi les nouvelles cheffes étoilées. 

Depuis trois éditions, la sélection Belgique et Luxembourg n’est plus imprimée mais figure uniquement en ligne. Au total, la sélection recommande 790 restaurants, dont 151 tables étoilées. Zilte et Boury conservent leurs trois étoiles mais plusieurs distinctions ont disparu du fait de la fermeture des restaurants (notamment The Jane à Anvers qui affichait deux étoiles, Le Fox à La Panne, La Canne en Ville à Bruxelles ou Eden Rose au Luxembourg, une étoile chacun). À noter aussi la rétrogradation de La Villa Lorraine by Yves Mattagne, passée de deux à une étoile.

_

Pratique | Lien vers le guide Michelin
Photographies | France Clarinval

LES COURTS BOUILLANTES

LES DERNIERS ARTICLES

Après les révélations de violences conjugales, quel avenir professionnel pour le chef Jean Imbert ?

Une enquête du magazine Elle a mis en évidence les violences conjugales de Jean Imbert, chef du Plaza Athénée et signataire de nombreuses cartes en France et à l’étranger. Les faits révélés, s’ils relèvent de la sphère privée, ne sont pas sans conséquences pour les établissements et les marques qui ont misé sur la puissance médiatique de l’ex-Top Chef. Risque économique, mauvaise image, bad buzz, comment les employeurs peuvent réagir à une telle situation, du silence radio à la rupture de contrat.

Jean Imbert et le « syndrome de Stockholm » vécu par ses collaborateurs

Après les révélations sur le fonctionnement violent de Jean Imbert avec ses compagnes, faut-il en conclure que le chef se comporte avec ses collaborateurs comme l’homme dans la sphère privée ? Bouillantes a recueilli plusieurs témoignages qui ne laissent guère de doute sur la personnalité d’un homme manipulateur dont l’emprise semble incontestable, jusqu’à provoquer un surprenant syndrome de Stockholm.

Jean, Hubert, Ivan et les autres : le #metoo de la restauration a peut-être commencé

Après les premières révélations publiées dès 2014, le sujet des violences en cuisine constitue un sujet plus ou moins régulier dans la presse et sur les réseaux sociaux. Il est revenu en force ces derniers jours avec des témoignages qui accusent directement et précisément certains acteurs de la restauration pour des faits répréhensibles commis en dehors de la chaleur des fourneaux. Après Jean Imbert il y a à peine quelques jours, une « figure montante de la scène food parisienne » vient d’être accusée d’avoir drogué au GHB une femme au sein même de son établissement. Laquelle ne serait manifestement pas un cas isolé. Quand les casseroles sortent à une telle cadence, il faut se demander si le #metoo des cuisines ne vient pas réellement de démarrer.

Le vin « nature » : expression du terroir ou dogme du laisser-faire ?

Défendu comme une expression pure du terroir, critiqué pour ses excès, le vin nature bouscule les codes du monde viticole. Ce « vin philosophique » selon l’expression du sommelier Xavier Thuizat interpelle tout un secteur, interroge un savoir-faire ancestral et repose la question de l’équilibre entre la maitrise et l’aléa, l’expression directe d’un terroir et la technique qui oriente. Derrière les idées reçues, entre idéal et réalité, est-ce finalement le nature qui dénature ?

L’Assiette Champenoise (Tinqueux, 51) : l’émotion renouvelée

Dans le cercle restreint des tables triplement étoilées françaises, l’Assiette Champenoise est régulièrement citée comme l’une des plus excitantes. Dans cette belle ville de Reims toujours plus étoilée, que vaut vraiment cette table dirigée par Arnaud Lallement, lequel peut compter depuis une année sur l’arrivée de son fils, Brice ? Retour d’expérience.

Drouant, son chef et ses belles bécasses postées sur Instagram

Romain Van Thienen, chef du restaurant Drouant (Paris, 2e arr.) a posté il y a quelques jours une vidéo et des photos de… bécasses accrochées dans les cuisines de son établissement. Se rendant compte de sa grosse bourde, il a rapidement supprimé tout le contenu. Mais le mal était fait.

Violences conjugales : Jean Imbert dans la tourmente

Porte défoncée, coup de boule… Selon nos informations, un article publié par le magazine Elle dans les prochaines heures relate différents faits graves de violences conjugales commis par le chef Jean Imbert. Lequel n’en serait malheureusement pas à son coup d’essai.

Le faux « ambassadeur » Guillaume Gomez va enfin assumer son rôle de vrai « consultant » au service de l’industrie agroalimentaire

Mais qui est vraiment Guillaume Gomez, un honnête défenseur des « petits » ou un opportuniste qui fait affaire avec les « gros » ? Celui qui s’est autoproclamé « ambassadeur de France de la Gastronomie » devrait dévoiler son jeu d’ici peu et annoncer officiellement le lancement de son agence de conseil au service de l’industrie agroalimentaire. La casquette change mais le boulot reste le même.

Partenariats à gogo : le Michelin s’est pris une veste par Hugo Roellinger

Lors de la cérémonie du guide Michelin, contrairement à tous ses confrères et consoeurs, le chef Hugo Roellinger n’a pas enfilé sa veste blanche offerte par le Bibendum, arborant les toutes chaudes trois étoiles mais aussi le nom de plusieurs partenaires qui ne collent pas vraiment avec l’esprit de la maison bretonne. Un acte solitaire qui honore un homme, une famille, et qui devrait interpeller toute une profession.

Alain Ducasse : bientôt sans biscuits ? 

Une étoile de perdue au Benoit, une étoile absente chez Ducasse Baccarat, un Meurice qui stagne à deux étoiles et, possiblement, la perte d’une mission de consulting emblématique pour Alain Ducasse. Le Monégasque est-il en train de perdre ses biscuits ?

Stephan Paroche et Justine Viano reprennent le Calice à Béziers (34)

Après le départ du chef Fabien Lefebvre, c’est le couple Justine Viano et Stephan Paroche qui reprend les rênes du restaurant Calice à Béziers. Par on ne sait quel miracle, alors que la table est fermée depuis plusieurs semaines et qu’il a été prévenu, le guide Michelin a laissé l’étoile.

La SNCF mène-t-elle grand train avec son nouveau bistro ?

La SNCF a lancé début mars une nouvelle offre de restauration à bord de ses TGV. Dans une sorte de retour sur son histoire et de tentative de coller à la mode des bistrots, des plats chauds tels que les crozets reblochon et la saucisse purée sont désormais disponibles. Mais est-ce bon ? Pour Bouillantes, la journaliste Sarah Rozenbaum a goûté.

Guillaume Galliot : « Mon terroir est international » (podcast)

Vu de Hong Kong, les problématiques des chefs de cuisine sont-elles les mêmes qu’en France ? Importance et impact des étoiles Michelin, sourcing produits, logistique, saisonnalité, autant de thèmes abordés avec le chef français Guillaume Galliot, à la tête du restaurant triplement étoilé Caprice, situé au sein du prestigieux hôtel Four Seaons. En expliquant que « (son) terroir est international, de la France jusqu’à l’Australie », on comprend que sa logique culinaire se distingue du discours français traditionnel. Un podcast dépaysant et instructif comme il faut. 

Ultraviolet (Shanghai) : fin d’une table d’intention

À quoi tient la véritable singularité d’un restaurant : la cuisine, le talent culinaire du chef, le prestige de l’adresse, les moyens économiques ? Et si la réponse se nichait ailleurs, du côté d’un vocable rarement utilisé dans le monde de la gastronomie, celui de l’intention ? Application d’une réflexion très concrète avec la fermeture prochaine du restaurant Ultraviolet de Paul Pairet.

Fermeture du restaurant Ultraviolet (Shanghai) : entretien avec Paul Pairet

Fin mars 2025, le restaurant Ultraviolet fermera définitivement ses portes après treize années d’activité. Ce concept, unique au monde, qui convoque tous les sens et propose une scénographie exceptionnelle du repas, a été récompensé de trois étoiles au guide Michelin. Le média Bouillantes s’est rendu à Shanghai pour rencontrer le chef Paul Pairet qui explique les raisons de cette fermeture et ses projets.