Bouillantes | Mercredi 30 octobre, vous avez envoyé un communiqué de presse intitulé « L’Épuisette sous le choc : la métropole demande la fermeture de notre établissement dans deux mois ». Que se passe-t-il exactement ?
Bernard Bonnet | Il s’agit d’un imbroglio… à la marseillaise. Dont il nous faut, les équipes et moi, sortir intelligemment en cadrant les actions médiatiques et juridiques. Le restaurant a été créé en 1938 et il est la propriété de ma famille depuis 1976. J’ai racheté l’établissement à mon père en 1992. Quant au chef en place, Guillaume Sourrieu, il est en place depuis 24 années, et l’étoile brille depuis 22 ans. Depuis le début de l’histoire, notre autorisation d’occupation temporaire du domaine public maritime (AOT) est renouvelée chaque année, sans que cela ne prête à discussion. En 2017, une réglementation européenne est apparue pour gérer le littoral dans ses grandes largueurs : ça va des parasols sur les plages italiennes jusqu’aux usines pétrochimiques sur le littoral hollandais, en passant par les AOT. Lesquelles seraient désormais de cinq ans. Je dis « seraient » car le texte est bien évidemment très flou sur ce point.
Il y a donc eu une mise en concurrence récente pour l’AOT, et donc l’exploitation, de l’Epuisette ?
Absolument. A laquelle nous avons répondu cet été, le 7 juillet précisément. Et, le 22 octobre, la décision de notre non renouvellement a été rendue ; décision qui nous a été transmise il y a seulement quelques heures. Nous devons rendre les clés le 1er janvier pour laisser place au groupe The Social Club et la cheffe Coline Faulquier. Cette décision, nous ne l’acceptons pas.
Concrètement, cette non-acceptation signifie que vous allez la contester en justice ?
Absolument. Après échanges avec mes avocats, et au regard du dossier, nous attaquons en justice cette décision car il y a selon nous un manque de régularité évident dans la procédure de mise en concurrence. Je m’explique : il y a un an, Monsieur Denis Allegrini, fondateur du groupe, s’est rapproché de moi, avec la cheffe Coline Faulquier, pour acquérir le fonds de commerce de l’Epuisette. Une négociation s’est ouverte et, comme toujours dans une telle configuration, des accords de confidentialité ont été signés. Ils ont donc eu accès à tous les documents et à des données confidentielles, placés sous le sceau du secret. Les négociations n’ont pas abouti. Fin de l’histoire. Sauf que ce même groupe, toujours en compagnie de Coline Faulquier, est revenu par le biais de la mise en concurrence pour reprendre l’affaire. Là, le problème juridique est évident. Ils ont profité d’informations confidentielles pour gagner le marché. Selon mes avocats, il y a là un gros souci d’ordre légal. Souci que nous allons soulever devant le tribunal compétent pour contester ladite décision.
Quelle est à ce jour l’avenir de vos 22 salariés ?
Nous sommes totalement dans le flou en termes d’information. Mais, d’un point de vue légal, et tel que c’est rédigé dans le dossier de mise en concurrence – qui faisait pas moins de 284 pages -, le repreneur a obligation de reprendre les 22 salariés. Il s’agit-là pour moi d’un point essentiel : défendre les intérêts des salariés et en premier lieu du chef.
Comment voyez-vous la suite de l’Epuisette ?
Comme je viens de vous le dire, nous allons nous battre sur le terrain juridique et tout faire pour conserver cette maison. Seule chose certaine, c’est que si nous venions à perdre définitivement cette maison, elle devrait changer de nom car je suis le propriétaire, à titre personnel, de la marque l’Epuisette. Pour l’instant, nous avons lancé une pétition sur le site du restaurant et invitons tous les amoureux de notre adresse à la soutenir.
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